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Le festin du ressentiment : quand la littérature devient armée de reconquête

05 Juil

Édito – Le festin du ressentiment : quand la littérature devient armée de reconquête

Le Français est un butin de guerre, disait Kateb. Mais voilà que certains veulent récupérer le butin… avec les excuses en moins et l’arrogance en prime.

Un groupuscule d’écrivains français – plume levée, regard bas – appelle aujourd’hui au boycott de l’Algérie. Oui, ce même pays qui leur sert de matériau littéraire, de punching-ball idéologique, d’alibi politique. Un pays qu’ils aiment surtout pour pouvoir le haïr à haute voix, en rond de salon et à coups de cocktails éditoriaux.

Les voilà, ces nouveaux croisés du verbe, réunis dans des salons dorés aux lustres poussiéreux, signant des tribunes comme on signe des fatwas républicaines. Leur cible ? L’Algérie. Leur motif ? Avoir osé ne pas plaire, ne pas courber l’échine, ne pas s’excuser d’exister. Et surtout : ne pas sanctifier Sansal, leur nouveau martyr d’opérette.

Ils appellent ça la littérature, nous appelons ça le retour du sabre enrobé de soie.

Il faut les lire pour le croire : des écrivains en croisade, des journalistes reconvertis en procureurs, des éditeurs devenus missionnaires. Ils citent la liberté, mais rêvent de censure. Ils brandissent les Lumières, mais ne supportent pas qu’un pays du Sud leur tienne tête. Ils prêchent la tolérance, mais excommunient tout ce qui échappe à leur évangile.

Ce n’est plus une guerre des idées, c’est un lynchage en smoking.

Et dans ce théâtre de l’absurde, Boualem Sansal devient leur sainte relique. Peu importe ce qu’il dit, ce qu’il écrit, ce qu’il répète à longueur de colonnes : tant qu’il cogne sur son pays, il est bon à publier. C’est leur bachagha littéraire. Le parfait indigène autorisé, diplômé en autoflagellation.

Alors non. L’Algérie ne s’agenouillera pas. Elle n’achètera pas leurs livres, elle n’applaudira pas leur spectacle, elle ne jouera pas dans leur mise en scène néocoloniale.

Boycotter, ce n’est pas censurer. C’est refuser d’être le public d’une pièce écrite contre soi. C’est choisir l’absence plutôt que la complicité. C’est dire : « Vous ne parlerez pas en notre nom, et surtout pas contre nous. »

Le 5 juillet, l’Algérie célèbre son indépendance. Que cette date serve aussi à gracier les imposteurs, à clore les procès éternels qu’on nous intente à coups de papier glacé et de micros tendus. À comprendre, une fois pour toutes, que certains n’aiment que les Algériens désarmés – de leur langue, de leur histoire, de leur mémoire.

Le combat continue. Non pas contre la France – mais contre ceux qui, depuis Paris ou ailleurs, rêvent encore de gérer notre présent comme ils ont géré notre passé : à coups de mensonges bien rédigés.


 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Politique et Société

 

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