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Archives d’Auteur: Jasmins de nuit

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À propos de Jasmins de nuit

« La mode passe, le style reste. » Merci Coco Chanel pour la punchline intemporelle. Ici, on ne parle pas que de fringues ou de tendances. On parle d’un regard. D’une manière de marcher dans le monde. D’un souffle — un peu poétique, un peu politique, un peu fou. Le style, c’est une humeur. C’est ce petit twist entre panache, pulsion et poésie. C’est l’art de réinventer les lieux, de faire swinguer le quotidien sans jamais oublier de s’amuser. 🇩🇿🇺🇸 Bienvenue dans un espace à mi-chemin entre Alger et Washington, où les vibes s’entremêlent, où l’on cause, l’on rit, l’on observe, l’on ose. J’espère que ce blog vous parlera. Mieux : j’espère que vous y laisserez vos battements de cœur, vos doutes, vos idées, vos cris et vos rires. Parce qu’un style, ça ne se porte pas seul. À vous de jouer. Cheers .

La scène, la cellule et la fable du captif éclairé

Il y a des mots qui ne veulent plus rien dire mais qu’on continue de répéter, comme on fredonne une chanson dans un cimetière. Liberté. Vérité. Témoin. Parole.

Beaucoup ont vu ces images, captées en février dernier mais pensées depuis longtemps. Une mise en scène ? Non. Une mise en cellule. Car le Comité pro-Sansal ne fait pas de littérature : il fabrique de la dramaturgie pénitentiaire. Et ce n’est pas une première. Le 16 décembre 2024, déjà, au Théâtre Libre à Paris – ironie de l’intitulé – on avait eu droit à la première représentation. Hier, c’était la deuxième. Et comme toute mauvaise pièce, elle n’a fait que rejouer la même scène, plus sombre, plus tendancieuse, plus travestie.

D’abord, le décor. Un plateau noir, sans issue. Une scène nue comme une vérité que l’on veut cadenasser. L’univers évoque moins le théâtre que le cachot : Sansal n’y est pas invité, il y est enfermé. Comme si, pour défendre sa liberté d’expression, il fallait l’enfermer dans une cellule imaginaire. Or, on le sait : Sansal passe plus de temps en soins palliatifs qu’en cellule réelle. Mais qu’importe le vrai, pourvu qu’on ait le frisson.

Ensuite, l’image. Le visage de Sansal trône. Lisse. Lustré. Retouché. En lettres capitales, grasses, imposantes comme un marteau sur la tempe. On ne lit pas son nom, on le subit. L’affiche dit : « attention, danger d’État ». Une esthétique de l’alerte, conçue pour hypnotiser. L’homme devient signal. Le romancier, urgence. L’auteur, un otage.

Puis viennent les intervenants. Et là, le casting est une confession. Kamel Daoud, convoqué comme symbole frelaté de « parole libre », tel un totem agité pour masquer l’absence de débat. Florence Aubenas, l’ex-otage d’Irak, recyclée ici pour produire de l’empathie sous vide. Roberto Saviano, qu’on projette en hologramme d’insoumission. La stratégie est claire : confondre les registres, croiser les traumatismes, universaliser le cas Sansal pour mieux exporter l’accusation. Un storytelling pavé d’intentions occidentales.

Sansal devient alors double.
Sansal-Aubenas, le captif éploré d’une tyrannie sans nom.
Sansal-Saviano, l’éveilleur solitaire traqué par l’obscurité algérienne.
Et Daoud ? Il joue Daoud. C’est-à-dire : celui qui désinforme avec art, fabule avec méthode, et torpille l’Algérie avec des références choisies sur mesure. Le VIIIᵉ siècle, par exemple, qu’il aime convoquer pour mieux figer le pays dans un décor d’archéologie politique. Son tic préféré : comparer le régime à un parchemin moisi, comme s’il ne savait plus penser autrement qu’en dialecte dénigrant.

Mais le vrai crime n’est pas dans les mots. Il est dans le silence.
Les applaudissements sont en voix off.
Les commentaires en ligne ? Désactivés.
L’illusion de démocratie s’arrête là où commence la peur du réel.
Le spectateur n’a pas droit à sa propre pensée. Le public est là, mais invisible. Comme dans les vieilles pièces de propagande soviétique.

Et pourtant, on nous parle de liberté.
Mais cette liberté-là est une franchise, un label, une arme douce à destination de ceux qui rêvent encore que le salut viendra de Paris.
La vraie guerre est là : une guerre littéraire, oui, mais géopolitique surtout.
Une guerre où l’Algérie n’est pas accusée, elle est requalifiée : non plus État, mais fiction. Non plus Nation, mais névrose.

Il est temps de le dire :
Quand un écrivain devient un drapeau, il cesse d’être un écrivain.
Quand un débat se joue sans contradicteur, il devient litanie.
Quand la littérature devient une arme pour légitimer les vieilles rancunes coloniales, alors le silence devient un devoir de résistance.


 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Politique et Société

 

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Le festin du ressentiment : quand la littérature devient armée de reconquête


Édito – Le festin du ressentiment : quand la littérature devient armée de reconquête

Le Français est un butin de guerre, disait Kateb. Mais voilà que certains veulent récupérer le butin… avec les excuses en moins et l’arrogance en prime.

Un groupuscule d’écrivains français – plume levée, regard bas – appelle aujourd’hui au boycott de l’Algérie. Oui, ce même pays qui leur sert de matériau littéraire, de punching-ball idéologique, d’alibi politique. Un pays qu’ils aiment surtout pour pouvoir le haïr à haute voix, en rond de salon et à coups de cocktails éditoriaux.

Les voilà, ces nouveaux croisés du verbe, réunis dans des salons dorés aux lustres poussiéreux, signant des tribunes comme on signe des fatwas républicaines. Leur cible ? L’Algérie. Leur motif ? Avoir osé ne pas plaire, ne pas courber l’échine, ne pas s’excuser d’exister. Et surtout : ne pas sanctifier Sansal, leur nouveau martyr d’opérette.

Ils appellent ça la littérature, nous appelons ça le retour du sabre enrobé de soie.

Il faut les lire pour le croire : des écrivains en croisade, des journalistes reconvertis en procureurs, des éditeurs devenus missionnaires. Ils citent la liberté, mais rêvent de censure. Ils brandissent les Lumières, mais ne supportent pas qu’un pays du Sud leur tienne tête. Ils prêchent la tolérance, mais excommunient tout ce qui échappe à leur évangile.

Ce n’est plus une guerre des idées, c’est un lynchage en smoking.

Et dans ce théâtre de l’absurde, Boualem Sansal devient leur sainte relique. Peu importe ce qu’il dit, ce qu’il écrit, ce qu’il répète à longueur de colonnes : tant qu’il cogne sur son pays, il est bon à publier. C’est leur bachagha littéraire. Le parfait indigène autorisé, diplômé en autoflagellation.

Alors non. L’Algérie ne s’agenouillera pas. Elle n’achètera pas leurs livres, elle n’applaudira pas leur spectacle, elle ne jouera pas dans leur mise en scène néocoloniale.

Boycotter, ce n’est pas censurer. C’est refuser d’être le public d’une pièce écrite contre soi. C’est choisir l’absence plutôt que la complicité. C’est dire : « Vous ne parlerez pas en notre nom, et surtout pas contre nous. »

Le 5 juillet, l’Algérie célèbre son indépendance. Que cette date serve aussi à gracier les imposteurs, à clore les procès éternels qu’on nous intente à coups de papier glacé et de micros tendus. À comprendre, une fois pour toutes, que certains n’aiment que les Algériens désarmés – de leur langue, de leur histoire, de leur mémoire.

Le combat continue. Non pas contre la France – mais contre ceux qui, depuis Paris ou ailleurs, rêvent encore de gérer notre présent comme ils ont géré notre passé : à coups de mensonges bien rédigés.


 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Politique et Société

 

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Le Goncourt de la dépossession : ce que l’affaire Saada Arbane dit du mépris français,

 

En 2024, un roman est couronné du plus prestigieux prix littéraire français : le Goncourt. Houris, signé Kamel Daoud, séduit par son « style », son sujet, sa charge tragique. Il raconte l’histoire d’une fillette algérienne, égorgée par des islamistes durant la décennie noire, survivante muette, ressuscitée par les mots.

Une fiction ? Non. Un plagiat ? Plus grave encore : une confiscation.

Car cette histoire, dans ses moindres détails, est celle de Saada Arbane, une femme bien réelle, bien vivante, et bien ignorée. Ce n’est pas une invention littéraire. C’est un récit de chair, de cicatrice, et de mémoire, recyclé sans consentement, déformé sans égard, et monétisé sans éthique.

Une enfant mutilée, devenue femme invisible,

À l’âge de 5 ans, Saada est victime d’une attaque terroriste dans un village d’Algérie. Égorgée, ses cordes vocales sectionnées, elle est laissée pour morte. Elle survit. Elle est recueillie, adoptée par une ministre Algérienne, Madame Zahia Mentouri, qui l’élève avec amour et exigence.

Saada grandit à Oran. Elle apprend à lire, à comprendre le monde. Elle parle — difficilement, par une canule, mais elle parle. Elle écrit. Elle pense. Elle n’a jamais quitté l’Algérie, jamais demandé d’asile en France ou ailleurs en occident, jamais quémandé d’antenne. Et peut-être est-ce précisément pour cela qu’on ne l’entend pas.

Une vie volée, mot pour mot,

Le roman de Kamel Daoud ne s’inspire pas vaguement de ce destin. Il le retranscrit minutieusement : le trauma, le mutisme, le cadre familial, les foulards de luxe, le tatouage, les détails médicaux… jusqu’à sa propre adresse.

L’histoire de Saada, vidée de son nom, devient Houris, un objet littéraire taillé pour les applaudissements des salons parisiens.

Le plus glaçant ? Saada affirme n’avoir jamais été informée. Et elle raconte que sa psychiatre — auprès de qui elle déposait ses souffrances — est l’épouse de l’auteur. Une trahison intime et médicale qui interroge lourdement l’éthique de la démarche.

Accuser la victime, blanchir l’auteur,

Lorsqu’elle découvre le roman, Saada parle. Elle refuse d’être effacée une deuxième fois — après avoir échappé à la mort, elle ne veut pas disparaître dans la fiction d’un autre. Elle dépose plainte. Elle alerte.

Et alors ? Silence.

Pire : la machine médiatique française se retourne contre elle. On murmure qu’elle serait “manipulée par les services Algériens”. Qu’elle “cherche à nuire”. On la psychologise, on la suspecte, on l’invisibilise. Pendant ce temps, Kamel Daoud enchaîne les interviews, les plateaux, les tribunes. Il nie. Il se dit persécuté. Il revêt le costume du “romancier harcelé par l’État Algérien”.

Cette inversion victimaire est d’une violence redoutable : l’agresseur devient martyr, la survivante devient suspecte.

Et personne ne vérifie, insinifiant est le nombre de ceux qui enquêtent. Il suffit de son prestige et de son réseau pour rendre sa version incontestable.

Une Algérienne qui ne rentre pas dans le cadre,

Pourquoi ce mutisme général ? Parce que Saada Arbane ne correspond pas au récit attendu.

Elle ne vit pas en France.

Elle n’est ni voilée, ni “sauvée” par la République.

Elle parle un français parfait.

Elle ne veut pas être une victime spectaculaire.

Et elle ose accuser un écrivain “intouchable”.

Dans les cercles postcoloniaux chics, on écoute les femmes du Sud seulement si elles viennent confirmer les récits convenus : l’exil salvateur, l’émancipation grâce à l’Occident, l’islamisme réduit à un décor. Saada, elle, ne joue pas ce rôle.

Une fiction coloniale sous vernis littéraire,

Ce que révèle cette affaire, ce n’est pas seulement un problème d’éthique individuelle. C’est un malaise structurel dans la façon dont les voix du Sud sont traitées dans la sphère culturelle française.

Kamel Daoud n’a pas “rendu hommage”. Il a parlé à la place. Il n’a pas donné une voix à une oubliée : il l’a dépossédée de la sienne.

Et la France intellectuelle, une fois de plus, a préféré le confort d’un récit bien écrit à la gêne d’une vérité dérangeante.

Ce que nous appelons:

Nous, le comité de soutien a Madame Saada Arbane nous demandons:

Plus d’enquêtes journalistiques indépendantes sur les faits.

Une prise de parole de la part des institutions littéraires françaises.

Un droit de réponse pour Saada Arbane dans les médias qui ont couvert le Goncourt.

Une réflexion de fond sur les mécanismes d’appropriation et d’effacement dans l’industrie littéraire.

Parce que ce silence, ce mépris, cette complicité passive nous concernent toutes et tous.

Parce que ce n’est pas un roman. C’est une mémoire volée. Et il est temps d’y faire face.

 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Litterrature

 

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Le roman volé de la France.

Il y a des écrivains qu’on lit, et d’autres qu’on exhibe. Des écrivains qui inventent des mondes, et ceux qui empruntent des vies. Kamel Daoud est de ceux qu’on exhibe : sur les plateaux, dans les salons, au sommet des bibliothèques républicaines. Il est devenu cette silhouette rassurante pour un pays inquiet, cet écrivain « d’origine » qui parle mieux qu’un indigène, qui critique mieux qu’un autochtone, qui agite le drapeau de la lucidité tout en faisant l’éloge discret de l’ordre établi.
Mais ce rôle a un prix : il faut plaire. Il faut s’arracher à son peuple pour mieux se lover dans l’ombre d’un autre. Il faut voler des voix, parfois, pour se construire une autorité. Et c’est ce que Kamel Daoud a fait avec Saada Arbane. Ce n’est pas un emprunt. C’est une dépossession. Il n’a pas écrit sur elle, il a parlé à sa place. Et cette substitution-là, si fréquente dans l’histoire coloniale, s’invite désormais dans les marges de la littérature.

La plume devient une mainmise. Le roman devient un viol feutré.

Ce vol-là ne se soigne pas avec un prix littéraire. Il n’appelle ni débat, ni nuance. Il ouvre une faille. Celle où la mémoire des autres devient la propriété d’un seul, légitimé par son style, validé par ses fréquentations, blanchi par la langue française elle-même. Dans cette histoire, ce n’est pas seulement une femme qu’on efface : c’est toute une tradition qu’on dévitalise. C’est la littérature francophone qu’on rend muette, anesthésiée par l’éclat d’une imposture.

Et puis il y a le reste. Il y a cette étrange habitude qu’a Daoud de tirer sur les cibles qu’on lui désigne. Les musulmans ? Il les décrit comme des enfants. Les binationaux ? Comme des citoyens à moitié loyaux. Les femmes ? Comme des abstractions à corriger. Les Palestiniens ? Comme des fictions dérangeantes pour la conscience française. Et les Français « de souche » ? Comme les derniers bastions d’une civilisation en péril, qu’il faudrait peut-être sauver du reste du monde.

Ses mots ressemblent à des diagnostics, mais ils soignent peu. Ils servent surtout à justifier. À blanchir. À nettoyer les mains de ceux qui ne veulent pas se salir. Il est devenu une conscience tranquille de la République : un écrivain arabe qui critique les Arabes, un exilé qui condamne les exilés, un intellectuel qui parle à l’oreille du pouvoir en feignant de lui résister.

Mais que reste-t-il, une fois le théâtre refermé ? Une parole brûlée. Une œuvre trouée. Une littérature trahie par l’un de ses enfants. Kamel Daoud ne fait pas du bien à la France. Il fait du bien à une France qui a peur, qui se crispe, qui préfère le roman à la réalité.

Et cela, ce n’est pas écrire. C’est servir.

 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Litterrature

 

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Kamel Daoud ou l’étrange soliloque du converti,

Par un regard venu d’ailleurs, resté lucide.

Il y a quelque chose d’inquiétant, de lassant aussi, à voir chaque semaine Kamel Daoud convoqué sur les plateaux, dans les journaux, sur les scènes de festivals, pour dire son malaise français. Un malaise qu’il croit universel, alors qu’il n’est souvent que le sien.

Selon lui, les Français sont trop mous, les binationaux trop fiers de leur origine, les jeunes générations issues de l’immigration presque traîtres envers leur pays d’accueil. Trop d’Afrique dans les cœurs, pas assez de France dans les tripes.

Étrange paradoxe que celui de cet homme qui se dit “plus Français que les Français”, mais dont l’amour de la République semble passer par le mépris systématique de ses enfants les plus sincères.

Kamel Daoud ne cesse de rappeler qu’il a appris le français à l’université, qu’il est né ailleurs, qu’il a souffert plus que les autres, qu’il mérite plus que les autres. Le mérite, chez lui, devient une frontière. Une arme. Une sorte de naturalisation par le haut, au mépris de ceux qui sont nés en France, ont grandi en France, et n’ont jamais eu besoin de haïr leur culture d’origine pour se sentir français.

Il faut le dire : des milliers de Franco-Algériens, professeurs, soignants, écrivains, artistes, entrepreneurs, œuvrent chaque jour à faire rayonner la France. Discrètement. Authentiquement. Sans injonction à choisir, sans ressentiment colonial recyclé en roman personnel.

Mais ces visages, ces réussites, ces voix apaisées sont invisibilisées par l’ombre bruyante de Daoud. Il est devenu la figure-totem d’un certain fantasme médiatique : celle du “bon immigré” qui cloue au pilori les autres et donne à la France une excuse pour ne pas écouter les voix divergentes.

Ni Amin Maalouf, ni Alain Mabanckou, ni Nina Bouraoui, ni même Alice Zeniter – pour ne citer que ces derniers- n’ont ressenti le besoin d’écraser leur héritage pour appartenir. Ils ont composé. Pensé. Transcendé.

Kamel Daoud, lui, a choisi le combat. Pas celui de la pensée, mais celui de la revanche.

Or la citoyenneté n’est pas une arène où l’on boxe sa propre origine à coups de chroniques hebdomadaires. C’est un exercice patient, quotidien, fait d’écoute, de doutes, de cohabitation.

Le drame, c’est que la France lui tend le micro sans jamais se demander pourquoi crie-t-il si fort. Peut-être parce qu’il lui dit ce qu’elle veut entendre. Peut-être aussi parce qu’elle a oublié d’écouter les autres.
Être français, ce n’est pas faire de la culture un ring.
C’est apprendre à conjuguer. À composer. À exister entre deux mondes sans en détruire un.

Kamel Daoud a peut-être oublié ça.
Nous, non.

 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Litterrature

 

Le Goncourt qui a volé une vie,

Une enfant laissée pour morte, une voix qu’on refuse d’entendre.

À 5 ans, Saada Arbane est égorgée par des terroristes islamistes dans l’Algérie déchirée de la décennie noire. Ils la laissent pour morte, comme un message, un avertissement cruel : une fille de trop, un corps de trop dans ce chaos sanglant.

Mais Saada ne meurt pas.

Elle survit. Recueillie, adoptée par Madame Zahia Mentouri, une ministre Algérienne, elle grandit dans un foyer aimant. Elle apprend à parler, à lire, à comprendre, à résister. Elle refuse que sa vie soit réduite à une cicatrice, à un numéro dans un récit victimaire. Elle s’élève, libre, cultivée, indocile.

Et pourtant, Saada demeure inaudible.

Une Algérienne libre, donc inaudible ?

Elle ne s’est pas enfuie. Elle n’a pas demandé l’asile en France. Elle vit à Oran, en Algérie, loin des projecteurs occidentaux, loin du récit commode des « sauvetages » occidentaux. Saada ne correspond pas aux stéréotypes qui nourrissent certains milieux littéraires français : pas de voile, pas de posture victimaire postcoloniale, un français impeccable, une éducation solide. Elle refuse d’être la victime que l’on voudrait entendre, et surtout, elle ose accuser un écrivain-star.

Dans le théâtre très codifié du postcolonialisme chic, les femmes du sud ne parlent que quand cela arrange. Saada dérange.

Le Goncourt qui a volé une vie

En 2024, un roman décroche le Prix Goncourt. L’histoire ? Une petite fille algérienne égorgée durant la decennie noire, qui survit et se reconstruit. Un récit bouleversant, encensé par la France intellectuelle, porté sur les plateaux télé. Un écrivain « courageux », qui « donne une voix aux oubliées ».

Seulement cette histoire, ce n’est pas la sienne. C’est celle de Saada Arbane, mot pour mot.

Le problème ? Saada n’a jamais donné son accord. Elle n’a jamais été consultée, ni même mentionnée. Sa vie, son trauma, ses mots ont été volés, transformés en fiction rentable, en mythe littéraire. Son sang, devenu best-seller.

Et quand elle parle, c’est le silence. Puis l’intimidation.

Quand la psychiatre trahit,

Saada croyait être en sécurité. Dans le cabinet d’une psychiatre, elle avait trouvé un refuge, un lieu pour déposer ses douleurs. Mais cette psychiatre est aussi l’épouse de l’écrivain primé.

Les confidences, les fragments de souvenirs, les cauchemars, se retrouvent dans un roman, sans avertissement, sans consentement. Une trahison médicale, intime, symbolique.

Puis vient la tentative d’achat du silence. Une proposition d’arrangement. Saada refuse. Elle ne veut pas être effacée deux fois : d’abord par les terroristes, puis par les élites intellectuelles.

Une plainte. Un micro. Et le mur du silence.

Saada decide de déposer plainte. Contre un Goncourt, une psychiatre, un système qui croit pouvoir tout se permettre, surtout face à une femme arabe.

Surprise : un journaliste algérien lui tend le micro, défendant sa vérité. Mais en France ? Silence. Pas de tribune, pas de soutien, aucune émission. Une omerta.

Saada n’existe pas.

Ce qu’on fait pour les autres, ce qu’on ne fait pas pour Saada

Quand Malala Yousafzai, Mahsa Amini, ou Zahra Joya souffrent, les médias se mobilisent, les campagnes de solidarité s’élèvent, les prix pleuvent.

Pour Saada ? Silence radio, invisibilisation totale, campagnes de diffamation. Pourquoi ?

Parce qu’elle vit en Algérie. Parce qu’elle ne correspond pas au récit exotique que la scène littéraire française affectionne. Parce qu’elle accuse un écrivain protégé. Parce qu’elle refuse de se taire.

Cette inégalité révèle un féminisme à géométrie variable, une solidarité à sens unique.

Ce que Saada révèle de nous,

Son histoire n’est pas qu’un drame individuel. C’est un miroir de nos sociétés, de nos médias, de nos élites.

Elle expose un féminisme clivant, une scène littéraire qui protège ses stars au détriment de la vérité. Elle nous force à questionner qui décide quelles histoires méritent d’être racontées, quelles souffrances valent l’indignation.

Le silence autour de Saada est un appel : à briser le déni, à affronter nos contradictions, à rendre justice à celles qu’on veut faire taire.

Ce combat n’est plus seulement le sien. Il est le nôtre.

Et toi, tu trouves normal, cette injustice ?
Pourquoi certaines voix méritent-elles d’être amplifiées, tandis que d’autres sont étouffées ?
La vraie question, c’est qui a le droit de parler, et qui doit se taire ?

Et toi, t’en penses quoi ?

Le Goncourt 2024.
Le Goncourt 2024. Houris, roman de Kamel Daoud.
 
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Publié par le 5 juillet 2025 dans Litterrature

 

Topographie d’une absence

Non, ce n’est pas une tragédie. Pas vraiment.
C’est plus discret que ça. Plus lent. Presque poli.
Comme une sonnerie d’alarme qu’on n’entend plus parce qu’elle dure depuis trop longtemps.

Vivre en adulte, ce n’est pas grandir. Ce serait trop clair, trop pédagogique.
C’est plutôt apprendre à faire avec l’absence.
À doser l’espace, à faire le tri entre le silence qui soigne et celui qui ronge.

Les autres parlent de solitude comme d’un état.
Mais il n’y a pas d’état. Il n’y a que des passages.
Des pièces sans lumière, des murs qu’on effleure du bout des phalanges en espérant que la peau, elle, comprenne ce qui échappe aux mots.

L’angoisse, c’est ce bruit sourd qu’on ne localise jamais.
Un tam-tam interne.
Ça vient du ventre, ça s’élève, ça tape doucement sous les côtes avant d’atterrir quelque part derrière les yeux.
Alors on respire. Trop fort. Trop vite.
Comme pour balayer un brouillard avec des bras trop courts.

Il n’y a personne pour répondre.
Pas vraiment.
Juste cette sensation d’être là, intact, minuscule.
Et vivant, justement, parce que personne ne vous regarde.

Il faudrait, peut-être, fermer les yeux.
Mais non.
Il faut les garder ouverts. Lutter contre l’idée d’abandon même dans le noir.
Tirer sur la respiration comme on tire une corde à linge, une dernière fois.
Pour se rappeler qu’on est là. Qu’on pèse. Qu’on pulse.

Mourir seul n’a rien d’héroïque.
C’est une chute banale. Une expiration sans témoin.
Mais avant cette fin — il y a ce théâtre du vide.
Ce face-à-face sans dialogue.
Cette performance involontaire d’un corps qui tient debout, sans personne dans les coulisses.

Et peut-être que c’est ça, être adulte.
Non pas gagner sa vie.
Mais apprendre à ne pas fuir le murmure de sa propre présence.

 
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Publié par le 2 juillet 2025 dans A pile et face

 

Icône du goût français, libre et fantasque, Andrée Putman a imposé son style unique et entraîné dans son sillage une génération d’architectes stars. En archives et témoignages, un bel hommage à la papesse du design, disparue il y a tout juste dix ans.

Documentaire de Saléha Gherdane (France, 2022, 52mn)

 
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Publié par le 29 janvier 2023 dans Mode & Art de vivre

 

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