Elle avait coutume de glisser son livre de chevet dans son sac et le promener ainsi de la maison au bureau,puis du bureau au super marché,ext,ext..
Le livre allait partout.
Il sillonnait la ville et assistait,a longueur de semaine,a des concerts.
Il visionnait des movies.
Il faisait de longues promenades dans des jardins français.
Il poussait,contre toute attente la fantaisie jusqu’à rentrer dans des librairies,question de se mesurer aux autres reliures…
Elle aimait a penser que ce mille-feuille en papier avait besoin de prendre l’air de temps a autre.
Elle était également persuadée que les livres la regardaient.
Toutes ces lignes suaves,ces courbes érotisées a certaines heures de la journées ,ces aiguës parfumés,ces hauteurs,ces durées,ces variations mémorielles bavardes comme des pies ,scrutaient ses moindres gestes,pariaient sur ses réactions et se jouaient de ses émotions au rythme de la ponctuation.
Ah,les points virgules qui ne sont la que pour marquer l’hésitation et entrecouper le souffle…Souvent c’est a quelques « points » prés que vous prenez conscience de ce que vous désirez et n’avez pas…
le rideau se lèvera ,bien des fois,au détour d’une série de petits points,sur une temporalité annonciatrice de long duels entre celui qui possède,l’auteur et cet autre qui désire,vous..
Les livres lui parlent également,non pas de cette voix du narrateur mais d’une toute autre palette vocale ,celle d’une couche cosmique qui déjoue nos calculs.
Bon ,je vous explique :
Non,plutôt,
Elle nous explique qu’au dessus de la voix de l’auteur et juste avant celle du héros, il y a tous ces autres non- dits.Toutes ces voix- off qui sont la véritable parole,le hors champs qui s’épaissit ,s’étoffe, gagne en relief, déborde pour finir par constituer le véritable socle de la romance qu’aucun livre ne saura raconter ni empêcher. .
Elle aimait a répéter que l’écriture, au fond ,est un acte solitaire.
l’auteur n’a pas besoin de l’autre pour se raconter…L’auteur n’a pas besoin du lecteur tellement il se voit en lui.
l’écriture est un acte spirituel,un lieu d’abstraction figuratif…l’ecriture est le point final de l’auteur car une fois le mot couché, la devant ,sur une feuille ,il ne lui appartiendra plus et deviendra l’apanage du lecteur et de ses multiples interprétations.
21:45,la nuit est encore longue…elle tend la main vers la table de chevet et s’empare d’une des trois bouteilles d’eau disposées de façon soigneuse et un rien obsessionnel. Tout est dit dans cette simple forme du récit…le délice de l’arrondie de cette main qui se replie sur la bouteille et non sans rappeler l’intention qui vient de l’intérieur…
23:06,une autre rasade d’eau qui viendrait interrompre l’exercice du récit, ce silence a solitude …elle essaye,au fond ,de gagner du temps et puise dans les civilités de l’écriture afin d’épargner son lecteur et lui éviter les bouleversements de la vie …du-moins pour cette nuit.