La culture méditerranéenne raconte généralement ses villes à travers leurs couleurs. Mais derrière la signature esthétique se cache toujours une histoire à démêler. La Tunisie revendique à juste titre l’invention du duo blanc et bleu, Alger brille depuis des siècles dans son blanc éblouissant et le Maroc a transformé Chefchaouen en carte touristique du « tout-bleu ».
Sauf que derrière cette façade se cache une réalité beaucoup plus complexe.
1. Alger, la blanche originelle.
L’expression « Alger la Blanche » ne relève pas d’une légende marketing moderne. Déjà au XIXᵉ siècle, voyageurs et chroniqueurs Européens décrivaient l’amphithéâtre de maisons blanchies à la chaux qui surplombait la baie.
Les façades n’étaient ni vert clair ni marron comme certains l’ont avancé. Elles étaient recouvertes de chaux, pratique autant qu’esthétique : réflexion de la lumière, fraîcheur intérieure.
Point central : La blancheur d’Alger est un patrimoine authentique, enraciné dans l’histoire ottomane et pré-ottomane, à la fois fonctionnel et symbolique.
2. Tunisie, pionnière du bleu et blanc
À Sidi Bou Saïd, la palette blanc & bleu s’impose dans les années 1920 grâce au baron Rodolphe d’Erlanger et son palais Ennejma Ezzahra.
Le bleu n’est pas qu’une couleur : il est talismanique, psychologiquement rafraîchissant et symboliquement méditerranéen.
Origine et authenticité : Avant Erlanger, les maisons tunisiennes utilisaient déjà la chaux blanche pour leurs façades et le bleu apparaissait dans les décors intérieurs et poteries hérités de l’Andalousie et de l’Afrique du Nord. Erlanger formalise et codifie cette esthétique, mais ne la crée pas ex nihilo.
Diffusion : Dans les années 1930–1950, les habitants adoptent le style, qui devient patrimoine identitaire Tunisien, non imposé par un acteur Européen, bien que sa popularisation soit initialement Européenne.
3. Chefchaouen -Maroc-, la légende bleue et la réalité trouble
Chefchaouen au Maroc, fondée au XVe siècle par des réfugiés Andalous, n’était pas bleue. Les murs blanchis sont repeints en bleu dans les années 1930 par des réfugiés juifs pour des raisons spirituelles et talismaniques.
Le mythe touristique : Dans les années 1990, l’industrie touristique et Instagram font de Chefchaouen la « ville bleue mondiale », effaçant la nuance historique et donnant l’impression d’une tradition séculaire.
Le volet criminel : Rappelons que derrière les ruelles azurées se cache l’un des fiefs historiques de la culture du cannabis au Maroc.
Les collines environnantes, les Rif, produisent du haschich depuis des décennies.
Chefchaouen sert de plaque tournante pour l’exportation clandestine vers l’Europe, mêlant tourisme et trafic de stupéfiants.
Cette double identité — ville pittoresque le jour, plaque tournante de la mafia la nuit — façonne, indeniablement, la perception internationale.
Recap:
La couleur en Méditerranée n’est jamais innocente. Elle raconte la lumière, la religion, le climat, mais aussi le marketing, la mémoire et parfois la criminalité
Alger : blancheur historique, fonctionnelle et authentique.
Sidi Bou Saïd- Tunisie- : bleu et blanc codifié, synthèse d’influences locales et formalisée par un Européen, mais adopté par les habitants.
Chefchaouen – Maroc-: bleu tardif, mythe mondial amplifié par le tourisme, associé à la culture du cannabis et aux réseaux de trafic vers l’Europe.
Entre Alger, Tunis et Chefchaouen, les couleurs racontent autant de vérités que de légendes et révèlent que derrière les cartes postales, il y a toujours plus d’ombres que de lumière. Photo ci-dessous: Alger la blanche.
Le Jardin Majorelle serait-il Français ? Entre l’enfance d’Yves Saint Laurent à Oran et la Casa Azul de Frida Kahlo à Mexico, la vérité éclate : le Maroc ne mérite aucun crédit, simple décor d’une imposture culturelle soigneusement montée.
Quand le bleu s’empare de la scène mondiale,
MARRAKECH — Chaque jour, des visiteurs affluent vers le Jardin Majorelle, fascinés par ses murs bleu cobalt, ses palmiers et ses touches de jaune éclatant. Dans le récit Français, ce lieu est présenté comme une création unique : l’invention visionnaire de Jacques Majorelle, ensuite sanctuarisée par Yves Saint Laurent. Mais cette histoire occulte une réalité troublante, qui se joue à des milliers de kilomètres de là, à Mexico.
La Casa Azul de Frida Kahlo, avec ses murs d’un bleu profond, ses accents rouges, jaunes et verts et son jardin luxuriant, existait déjà. Les deux espaces émergent dans les années 1920 et 1930, animés par le même désir : fusionner art, identité et environnement. Pourtant, dans le discours Français, le parallèle reste presque toujours invisible.
Esthétiques parallèles, récits divergents,
À Coyoacán, Kahlo et Diego Rivera transforment une maison familiale en manifeste national. Chaque couleur, chaque plante, chaque objet précolombien affirme la Mexicanité. À Marrakech, le bleu de Majorelle et son jardin exotique sont présentés comme une invention isolée. Le langage visuel se ressemble — primaires saturées sur fond de vert — mais les récits diffèrent radicalement.
Ce silence est révélateur. Reconnaître Kahlo ou les mouvements transnationaux qui ont inspiré ces couleurs fragiliserait le mythe de l’exception française : celui d’un miracle isolé, d’une création née de rien.
Yves Saint Laurent et la palette Algérienne,
Le mythe s’étend à Yves Saint Laurent. On raconte qu’il trouva sa palette à Marrakech. En réalité, son regard s’était formé bien avant, à Oran, en Algérie, où il grandit entouré de façades blanches, de murs ocre, de volets bleu profond et de jardins verts. Marrakech a peut-être ravivé ces souvenirs, mais elle ne les a pas inventés.
Le prix du silence,
Cette omission n’est pas anodine. Elle transforme des traditions artistiques partagées en trophées nationaux, relègue l’Algérie au rang de note de bas de page, et efface le Mexique tout entier. Marrakech, labellisée « ville rouge », n’a jamais produit ce bleu Majorelle : il s’agit d’une couleur importée, étrangère au paysage et à la tradition locale. Ce contraste artificiel renforce l’idée que le Maroc n’a aucun mérite et ne fait que servir de décor à une imposture culturelle Française.
Le résultat n’est pas une histoire globale d’expériences artistiques convergentes sous des soleils similaires, mais une légende soigneusement façonnée d’ingéniosité Française en terre étrangère.
En réalité, la Casa Azul, le Jardin Majorelle et l’enfance Oranaise de Saint Laurent appartiennent à la même histoire mondiale : des artistes confrontés à une lumière écrasante, répliquant par des couleurs franches et inscrivant leur identité dans murs et jardins. La différence réside dans la narration : l’une est célébrée internationalement, l’autre nationalisée et domestiquée. Photo1: « La Casa Azul, où Frida a vécu une grande partie de sa vie, mêle art, histoire et émotions. C’est ici que l’on peut comprendre la profondeur de son œuvre, intimement liée à sa vie personnelle, ses souffrances et ses passions. » Photo2: « La Casa Azul tient son nom de ses murs vivement peints en bleu cobalt, choix de Frida Kahlo et Diego Rivera pour symboliser leur amour pour la culture mexicaine et l’art populaire. » Photo3: Le jardin Majorelle autour de la villa Oasis. Cette dernière servait d’atelier à Yves Saint Laurent, qui avait élu domicile à Marrakech dès 1919.
Il fallait un « fils ». Pas un disciple et surtout pas un lecteur — un héritier utilisable. L’édition parisienne l’a trouvé : Kamel Daoud, propulsé « enfant légitime » d’Albert Camus.
Le récit est simple, donc bankable : un écrivain Algérien reprend « L’Étranger », donne une voix à « l’Arabe », et l’on déclare aussitôt la filiation.
Tout est prêt pour la mise en rayon : titres accrocheurs, quatrièmes exaltées, plateaux TV, prix, podcasts, tribunes. Peu importe que la parenté littéraire soit introuvable, elle est symbolique, médiatique, marchande — et surtout idéologique-politique.
C’est une architecture de discours, pas une évidence d’écriture.
Mode d’emploi d’un héritier (Parisien),
1-Ancrage : rattacher Daoud à Camus par « Meursault, contre-enquête ».
2-Répétition : saturer la presse de la formule « l’enfant légitime » jusqu’à ce qu’elle ait l’air vraie.
3-Captation mémorielle : faire de la littérature Algérienne un prolongement de Camus — donc lisible, domestiqué, patrimonialisé.
4-Valorisation commerciale : prix, festivals, grands entretiens, on vend une histoire autant qu’un livre.
5-Neutralisation du dissensus : toute objection (style dissemblable, biographies opposées, recyclages) est requalifiée en « débat stimulant ».
Le récit tient, donc il vend.
Camus : le réalisme contre l’injonction au meeting,
Rappel salutaire : Camus n’a pas écrit des tracts. Il a décrit l’Algérie coloniale telle qu’elle était.
L’« Arabe » sans nom dans L’Étranger ? Scandaleux aujourd’hui, réaliste a l’epoque : l’indigène était juridiquement et symboliquement anonymisé.
Autrement dit, Camus n’est pas Sartre et n’a jamais prétendu l’être. Il écrit sec, net, presque minéral. Une seule phrase suffit : « Aujourd’hui, maman est morte. » Aucun pathos, aucune posture, la brutalité nue du réel.
On peut débattre du silence politique mais jamais lui reprocher de n’avoir pas joué un rôle qu’il refusait.
Non, Camus n’est pas un tribun : il est un écrivain du réel.
Daoud : l’effet miroir, la commande, la contradiction,
Daoud est venu par le commentaire. « Meursault, contre-enquête » fut un geste : renverser la focale. Soit. Mais l’avant comme l’après se répètent. « Ô Pharaon », « Houris » : des livres qui donnent le sentiment de répondre à des attentes externes — d’où l’impression récurrente de romans de commande, pensés pour un moment, un acheteur, une polémique.
On rejoue l’Algérie des années 80, avec des témoignages qui varient d’une interview à l’autre, le terrain se fait glissant, l’autorité comme la légitimité vacillent.
Et le style ? Rien à voir avec Camus : baroque, oratoire, gonflé de métaphores et de provocations.
Camus taille la phrase, Daoud l’enfle.
Camus observe, Daoud se met en scène.
Deux régimes d’écriture, deux économies morales, zéro continuité esthétique.
Biographies : des vies qui ne se parlent pas.
Camus : pauvreté à Belcourt, mère analphabète, promiscuité sociale, la mer comme horizon, la lumière comme matière.
Daoud : né après a Mesra apres l’indépendance, loin de la mer, écoles Algériennes, famille de condition moyenne mais certainement pas pauvre.
Aucune nécessité partagée, aucune mémoire commune. On peut coudre toutes les étiquettes qu’on veut, la géologie intime n’est pas la même.
Camus, enfant de la mer ; Daoud, enfant de l’intérieur. La filiation biographique ne tient pas deux minutes.
« Langue intérieure » : un emprunt maquillé en signature
Lorsqu’on brandit la « langue intérieure » comme la trouvaille d’un seul, on efface une histoire critique : Assia Djebar et Kateb Yacine en ont longuement fait l’outil même de lecture de la littérature Algérienne Francophone. Ce champ est préexistant ; l’invoquer aujourd’hui n’en fait pas une invention.
Rien de spécifique, rien de neuf sinon un héritage repris, rebaptisé et vendu comme label personnel. Nous ne sommes pas a une usurpation près .
Le système Parisien : mécanique d’appropriation mémorielle,
Voici où tout se joue — pas dans les textes mais dans l’appareil.
– Marketing de filiation : on fabrique une lignée parce qu’une lignée rassure et se vend. « Héritier de Camus » est plus efficace qu’« écrivain Algérien singulier ».
– Prix & circuits : salons, jurys, dîners, plateaux — cocon d’entre-soi qui valide le récit et l’institue en vérité publique.
– Éditorialisation des polémiques : un livre, un scandale calibré (Houris en a fourni l’occasion), des tribunes dans la foulée : la polémique devient campagne de lancement.
-Quatrièmes & blurbs : on cite Camus partout, on convoque « la Méditerranée », « la lumière », « l’absurde » — éléments de langage recyclés qui créent l’illusion d’une continuité.
Caution Algérienne : Paris adore exhiber un « héritier » pour se penser généreux avec l’Algérie, tout en gardant la centralité Camusienne comme prisme d’accès.
Canon verrouillé : tant que Camus reste la porte d’entrée obligée, le présent Algérien se lit en arrière, et les œuvres qui ne rentrent pas dans le cadre disparaissent des radars.
Pourquoi cette filiation est politique?
Parce qu’elle pacifie le rapport colonial en le patrimonialisant : si Daoud prolonge Camus, l’histoire devient « transmission », l’altérité est adoucie en héritage littéraire commun. Parce qu’elle neutralise la diversité Algérienne : une voix « compatible » suffit, le reste devient décor.
Parce qu’elle externalise le contrôle du récit : c’est Paris qui désigne l’héritier, Paris qui homologue la filiation, Paris qui encaisse la rente symbolique et commerciale.
Retour aux œuvres : ce qui ne colle pas (et ne collera pas)
Projet : Camus écrit le réel sans tribune ; on lui demande d’être Sartre. Non.
Style : limpidité, retenue, minéralité chez Camus ; emphase, oratoire, baroque chez Daoud.
Biographie : pauvreté + mer (Camus) vs post-indépendance + Mesra (Daoud).
Geste littéraire : Camus pose ; Daoud réagit.
Concepts : la « langue intérieure » n’est pas la sienne : Djebar et Kateb l’ont travaillée avant lui.
Trajectoire éditoriale : la répétition de schémas (romans qui semblent répondre à des commandes, polémiques opportunes) sert l’appareil plus que l’exigence littéraire.
Tout cela ne dessine pas une lignée : cela cartographie une construction.
Au final, qui pénalise t-on dans l’opération ?
1-Le lecteur, d’abord, qu’on infantilise à coups de mythologies prêtes-à-vendre.
2-Les autres écrivains Algériens, dans un deuxieme temps, qu’on invisibilise parce qu’ils ne cochent pas la case « héritier de ». 3-3-L’histoire littéraire, enfin, qu’on réécrit pour l’ajuster aux besoins d’une capitale qui se rêve métropole de la mémoire autant que du livre.
Recap:
Camus n’a pas de « fils », Il a des lecteurs — et des œuvres. On peut aimer Camus sans lui fabriquer des héritiers.
On peut lire Daoud sans lui inventer une ascendance. Or tant que l’édition Parisienne organisera la littérature Algérienne autour de Camus comme matrice et d’un « héritier » homologué, on confondra critique-marketing, mémoire -marchandise et politique-littérature.
Que reste t-il a faire?
Refusons l’angle facile et relisons Camus pour ce qu’il fait : un réalisme sec qui refuse la tribune.
Relisons Daoud pour ce qu’il produit : des textes oratoires, répétitifs, polémiques, qui semblent souvent calibrés pour l’époque et ses plateaux.
Mais surtout cessons de confondre une fiction de filiation avec une vérité d’écriture. Le reste, tout le reste appartient aux attachés de presse.
Elle ne l’avait jamais remarqué. Il faut dire qu’il n’était pas son type d’homme. Peut-être même faisait-il partie de ceux qu’elle ne voit jamais. Un brin excentrique, parlant à voix haute, ce genre de voix qu’on force pour exister un peu plus dans l’espace. Elle n’aimait pas ça.
Il tendit la main en premier, sûr de lui, presque joyeux : — Nous sommes collègues, on m’a parlé de vous… Je suis ravi de vous rencontrer. Elle sourit poliment, retira sa main aussitôt. Aucun commentaire. Juste un sobre : — Bonne journée. Légèrement déconcerté, il enchaîna sur une blague avant de s’éloigner, seul avec son enthousiasme.
Ceci n’est pas un témoignage. C’est un récit bancal, sensible, celui d’une femme qui aurait misé sa vie sur le désordre d’une image floue, sur une hésitation à peine formulée, une intuition qui n’en était même pas une. Juste un vertige. Un trouble passager.
Car la certitude, selon elle, n’est qu’une lentille oblique. Elle donne l’illusion de voir net, mais elle déforme. Elle arrache au mouvement, elle cloue. Et elle, elle voulait flotter encore un peu. Rester dehors. Au bord. Entre deux évidences. Dans ce battement fragile où chaque chose pourrait encore basculer. Elle le recroisa un jeudi, tard dans l’après-midi.
C’était dans une librairie, celle avec les fauteuils en velours au fond, où l’on vient surtout pour respirer un peu mieux. Il était là, seul, assis dans l’un de ces fauteuils. Il lisait à voix basse. Pas fort, non, cette fois c’était presque un murmure. Un texte de Malek Haddad, si elle en croyait l’incipit. Elle s’attarda sans le vouloir, suspendue à cette voix qu’elle croyait ne pas aimer.
Elle voulut partir. Renaître dans le silence. Mais il leva les yeux et la vit.
Il sourit, cette fois sans s’imposer. — Vous lisez Malek Haddad ? Elle haussa les épaules : — Par intermittence. — C’est la seule manière, je crois.
Il ne chercha pas à remplir le vide. Il tourna les pages, comme si ce fragment d’échange suffisait.
Alors elle s’assit, à deux fauteuils de lui. Ne dit rien. N’ajouta rien. Elle resta là, à écouter les pages tourner.
C’était ça, peut-être, le début d’autre chose. Pas un choc, pas une révélation. Une infime réouverture. Une brèche. Elle pensa : il n’est toujours pas mon type. Mais il existe.
Il disait : « De tous les chemins de notre jeunesse, celui qui ne s’oublie pas est le petit chemin de la plage, celui qui, de nuit, nous menait à notre rendez-vous amoureux de l’été. »
Moi, je me suis tue. Le chemin était là. L’amour, lui, ne s’est jamais présenté.
Je me souviens du sable froid sous mes pieds, des étoiles timides et de ce vide au bout du sentier. Seulement, la mémoire n’est pas la vraie vie. C’est une transcription floue, un reflet tremblant. Elle n’explique pas. Elle égare.
Les souvenirs ne tiennent pas la distance. Ils flottent. Ils dérivent. Et parfois, ils s’effacent tout simplement.
Aujourd’hui, les lacunes sont plus nettes, plus obstinées. Peut-être parce qu’elle a passé tout l’après-midi à regarder ses émissions préférées en replay. Philosophie, djihadisme, un débat sur la maison Gallimard, et puis ce film d’un jeune réalisateur britannique dont le nom lui échappe, et lui échappera encore, pendant plusieurs heures.
Elle sent déjà cette gêne familière au creux du front, cette oppression diffuse, comme un fil qui lâche.
Agacée, elle se lève. Ouvre la porte du frigo avec l’élan précis de l’habitude. Espère y trouver de l’eau fraîche.
Et…
Le frigo est vide. Impeccablement, rageusement vide.
C’était donc ça. Elle avait, magistralement, oublié de faire les courses de la semaine.
Un soupir. Une exaspération douce. Elle allait s’en vouloir, vraiment, puis elle entend :
— Ça va, maman ? Tu sembles soucieuse ?
La voix est douce. Elle répare.
Elle se retourne, un peu confuse, un sourire au bord des lèvres. Elle glisse doucement à l’oreille de sa fille :
— C’est la journée des courses… Tu m’y accompagnes, dis ?
Et tout s’allège un peu. Pas de drame. Juste une faille douce dans le tissu du quotidien. Un oubli, une main tendue, un frigo vide, un amour toujours en attente.
Mais ce soir, au moins, elles marcheront côte à côte. Vers le marché. Vers la suite.
Sa voix pensait à sa place. C’était mieux avant — le goût pour la poésie, pour le panache, réinventait les lieux avec les notes en toile de fond. C’était mieux avant, quand elle n’avait pas besoin de dire : je me souviens.
Auparavant. Un mot assez curieux. Qu’on pourrait confondre avec un sac à main féminin — un sac où se mêleraient les choses précieuses et les futilités.
Et pour une seconde, elle fut tentée d’aller voir dans tous les recoins ce qui s’y passe. De vider les fonds de poche. D’y trouver un ticket de bus ancien, une mèche de cheveux oubliée, une date inscrite sans sens. Peut-être, qui sait, une invitation. Une brèche dans le présent.
Glisser dans une certaine communauté où l’incertitude débouche toujours sur quelque chose. Un geste. Un visage. Un contretemps fécond.
Et justement, le contretemps s’installe.
La file de voitures serpente, lente, étirée sur au moins deux kilomètres. Les écrans géants annoncent un ralentissement de 30 minutes, des numéros d’urgence à appeler, la menace d’une amende de 250 dollars si la ceinture est lâche — mais rien, jamais rien, sur les existences désordonnées qu’on tente de maintenir debout.
En citadins bien dressés, on patiente. On serre les dents. On scrolle sans conviction. On répond à des mails qu’on ne lira plus.
Les sirènes crissent. Un désastre ailleurs, une tension ici.
Et puis, dans le rétroviseur, un mouvement. Les voitures basculent, reculent, cherchent la sortie.
Une faille. Je la saisis. Je la suis.
Et là — surprise.
Des jardins. Impeccables. Presque irréels. Des pelouses épaisses comme des promesses. Des haies disciplinées. Un air de campagne dans les plis discrets de Washington DC Ouest.
La ville s’efface un instant devant le jardin.
J’abandonne la route. Je stationne. J’avance à pied. Le cœur allégé. Cette déviation devient, contre toute attente, l’incartade la plus brillante du mois.
Dénombrer tous les soirs les premières lumières du quartier était une seconde nature. Comme un cordon ombilical qui la reliait encore à son enfance. Plusieurs années plus tard, elle continuait à guetter au-delà des fenêtres allumées, qu’il s’agisse de celles bordant les rues de Soho à New York ou de Georgetown à Washington D.C. C’était le même geste, le même appel muet : chercher des signes de vie, deviner les secrets derrière les rideaux entrouverts. Ce n’était pas de la curiosité malsaine. Plutôt une forme d’ancrage.
Elle marchait beaucoup, parfois sans but. Elle se laissait porter par les villes, les traversait comme on traverse un rêve fiévreux, dans l’épaisseur du temps. Elle regardait les passants, écoutait les voix, absorbait les sons. Chaque ville avait son grain, sa densité, son humeur.
Elle n’avait jamais aimé les trajets rectilignes. Les détours lui parlaient davantage. Ils offraient de la place au mystère, au trouble. Elle préférait les ruelles incertaines, les escaliers de secours, les angles morts. Le désordre comme promesse. Le vacillement comme méthode.
Égrener une ville, pour beaucoup, se résume à une énumération pressée : trottoirs fissurés, asphalte aveugle, panneaux publicitaires criards, rames de métro sombres, klaxons sans répit, bouches d’égout fumantes, rues coupées net par des impasses sans grâce. À les entendre, la ville est un piège, un labyrinthe d’épuisement, une accumulation de stimuli voués à étouffer le désir. Mille et une raisons de perdre le nord, ou de se barricader dans l’indifférence.
Mais ce n’est pas ce qu’elle voit. Ce n’est pas ce qu’elle ressent.
Elle évoque plutôt une ville vivante. Une scène mouvante, miraculée, où le naturel se drape de fabuleux. Une ville comme un poème caché dans un cahier d’école, griffonné entre deux listes de courses. Elle existe, cette ville-là — mais elle exige attention. Elle impose qu’on ralentisse. Qu’on s’attarde, qu’on s’infiltre, qu’on creuse dans l’épaisseur du quotidien jusqu’à y dénicher les filons d’émerveillement. Une brise dans une ruelle étroite peut suffire. Un reflet dans une flaque. Un pas mal assuré qui devient pas de danse. Alors, sans même s’en rendre compte, on entre dans un territoire de fécondité, de beauté immédiate, jamais annoncée, jamais attendue.
Les restaurants, eux, sont des chapelles du quotidien. Elle y entre souvent sans faim, portée par une autre soif — celle du son. Le cliquetis des couverts, le tintement discret des verres, les conversations mi-chuchotées dans le creux des épaules, le frisson d’un rire qui naît sous une nappe brodée. Et puis ce rayon de soleil, minuscule, obstiné, qui se pose sur le coin de la table comme un invité tardif. Ce n’est pas le menu qui l’attire. C’est la promesse d’un moment. L’orchestre fragile d’un midi suspendu.
Dans ces instants, les voix des clients, voilées par les notes jazzy échappées de la cuisine, lui procurent une joie rare. Comme un souffle juste, un accord parfait entre elle et le monde. Par réflexe — ou par manie — elle tourne l’enregistreur en catimini et vole ces fragments de vie, ces pulsations vraies, pour les garder au chaud. Manger devient un prétexte. Ce qui compte, c’est prolonger l’expérience sensorielle, la dilater, l’archiver. Les sons, les souffles, les silences, tout lui importe.
Et lorsqu’elle rentre, il lui arrive de réécouter ces moments, dans la pénombre de son salon, les yeux fermés. Un enregistrement d’un déjeuner à Paris, un éclat de voix capté à Séville , le tintement d’une petite cuillère à Abu Dhabi. Le monde tout entier, ramené dans un simple fichier audio. Et ce soir-là, alors que les dernières notes s’échappaient des enceintes, elle a vu le carton. Il était là, près du mur, encore entrouvert. Le paquet venu d’Algérie. À bout de bleu
Chapitre IV — À bout de bleu
Texte écrit à la suite de la réception d’une œuvre bleue, arrivée d’Algérie, en plein hiver. Le bleu y est matière et mémoire. Le texte est adressé à l’artiste mais parle aussi d’elle, de moi, de ce qui nous relie sans se dire. Ce texte est une réponse, mais surtout une traversée.
La scène s’ouvre sur une pièce bien grande, ourlée d’une baie vitrée occupant tout le mur du fond et donnant sur un jardin à la pelouse parfaitement entretenue. Dans un coin : un plateau en zellige vert foncé, une tasse avec un fond de café froid, une théière chinoise, deux grandes tasses imbriquées, un pot de yaourt nature vide. Un peu plus à droite, un carton entrouvert. Elle venait de le déballer.
À l’intérieur, un tableau, soigneusement enveloppé dans du papier de soie. Une toile bleue. Elle l’a placée sur une étagère, face à la lumière, presque à hauteur de regard. Le bleu s’y répandait comme un souffle. Elle a reculé d’un pas. Puis deux. Quelque chose flottait dans la pièce. Elle n’a pas su dire quoi.
Elle s’est assise. A ouvert son laptop. A commencé à écrire à l’expéditeur.
Je t’offrirai toutes les gazelles bleues. Yves Klein disait : « Mes peintures ne sont que les cendres de mon art. »
Mais l’écran devient une peau. Une distance. Il échoue à restituer la texture, la matière, l’excès de cette explosion de bleu qui jaillit dans sa tête comme un éclat d’Algérie. Ça l’étourdit. Ça l’enivre. Elle ne voit plus : elle sent.
Alors, à bout de bleu, elle écrit.
Comment traverser ce champ pictural sans se perdre ? Comment résoudre la problématique artistique, cette tension entre la chair et le spirituel ?
Le bleu est partout. En vagues épaisses. En taches compactes. En masses rocailleuses, profondes. En miroirs. En touches discrètes, presque murmurées.
Il déconstruit le temps. Il recompose l’espace. Il revisite les rituels. Il dit l’Histoire. Il suggère une autre naissance. Une Terre désormais bleue.
Alors commence le pèlerinage. Non pas vers l’au-delà, mais vers l’eau-delà. Le geste pictural devient incantation. Le bleu devient prière.
Et dans cet espace immatériel, une question suspendue : Qui a créé quoi ? La montagne, nez au ciel ? Le regard touareg ? Ou la lumière elle-même ?
L’artiste éclaire la matière, puis s’efface. Il laisse le rêve s’installer.
Mes montagnes sont bleues. Mon désert est mer.
Et toujours, cette voix dans le lointain qui murmure :
« On dira ce qu’on voudra, c’est peut-être une vraie gazelle, c’est peut-être une vraie gazelle qui n’est pas vraie… Mais elle a dit : Tu peux me prendre si tu veux. Et il a dit : Je veux bien. Yaminata sera heureuse. Elle aura une gazelle, un enfant, un foulard… »
P.S. Cette toile n’est pas la mer. Ni le désert. Ni le ciel. Cette toile est mon âme voguant sur les cimes de mes années algériennes, de bout en bout, et venant à bout des tendresses maladroites et longuement tues.
Merci l’Artiste.
Index, Tableaux: « Le Hoggar » de l’Artiste peintre Hocine Ziani Extraits du livre: de Malek Haddad. Je t’offrirai une gazelle.|
Elle s’éveilla sans bouger. À peine un souffle, à peine un bruit. Ce n’était ni la lumière ni la voix intérieure qui la tirait du sommeil, mais cette sensation diffuse, instinctive, presque animale : une odeur. Les lieux s’imposent d’abord par le nez. Avant même d’ouvrir les yeux, elle savait où elle était, ou du moins où elle avait été. L’odeur salée d’un balcon tourné vers la Méditerranée, le goût du vent chaud, légèrement iodé, qui colle à la peau et s’incruste dans les cheveux. Cette odeur-là n’a pas besoin de lieu, elle est le lieu. Tout comme l’huile chaude d’une ruelle d’Alger, mêlée au sucre et à la pâte qui frémit dans la friture du matin. On y reconnaît la Casbah avant même d’y mettre les pieds. À des milliers de kilomètres de là, dans la géométrie froide des malls de Dubai, ce sont les notes persistantes de santal et de patchouli qui tissent le décor, la climatisation sèche qui donne au luxe cette allure chirurgicale, distante. Et puis il y a Washington, ses trottoirs lissés, ses arbres parfaitement taillés, et ce parfum de cherry blossom, trop doux, trop propre, presque faux dans sa perfection. C’est toujours l’odeur qui précède le monde.
À ses yeux, l’odeur ne se contentait pas de décrire un lieu, elle en construisait la mémoire. Elle façonnait les émotions, dictait l’humeur des jours. Une journée pouvait être douce ou douloureuse selon ce que l’on respirait au moment de l’ouvrir. Rien n’était plus fiable, plus direct, plus intime. Le cœur était trop symbolique, les souvenirs trop construits, alors qu’un parfum ressuscitait un instant entier sans détour. Une bouffée et tout remontait. Une autre, et tout s’effondrait. Le corps se souvenait avant elle.
Elle se rappelait cette ville perchée sur la Méditerranée, où les soirées n’étaient qu’un prolongement muet de l’après-midi. Le soleil s’était retiré, oui, mais la chaleur demeurait, collée aux murs des maisons en pierre, suspendue aux rideaux que le moindre souffle d’air ne suffisait pas à soulever. Dans ce calme épais, les chiens, épuisés, gardaient les yeux mi-clos, allongés dans les angles d’ombre. Rien ne faisait bruit, sinon le générique diffusé par tous les postes de télévisions du quartier : Le riche et le pauvre, un feuilleton devenu rite nocturne, que chacun suivait sans le dire, en silence, à travers les fenêtres entrouvertes. C’est de cette ambiance suspendue qu’un souvenir précis remontait : une nuit particulière, elle avait suivi son grand frère jusqu’à l’épicerie du coin. Il y avait acheté une bouteille de Hammoud Boualem glacée. Une bouteille en verre sombre, perlée de gouttelettes, qui brillait sous les lampadaires comme une promesse d’ailleurs.
Elle se souvenait de la difficulté à suivre ses pas. Il allait vite, lui. Il voulait rentrer avant la fin du générique, et elle, elle courait à petits pas, s’appliquant à ne pas le perdre, à ne pas rester seule dans cette nuit qui ne lui appartenait pas. Ce n’était pas dans ses habitudes de sortir après le coucher du soleil. La chaleur nocturne, étrange, presque hostile, ajoutait au vertige de cette escapade. Mais ce qu’elle n’a jamais oublié, ce sont les lumières. Suspendues aux fenêtres, sans logique ni symétrie, elles semblaient respirer doucement. Et surtout, il y avait l’odeur du jasmin de nuit. Un parfum dense, presque liquide, qui s’enroulait autour des jambes, remontait jusqu’aux tempes, laissait dans l’air comme une mélodie invisible. Ce n’était ni un détail ni un décor. C’était le centre. L’odeur avait rendu cette nuit inoubliable, alors même qu’elle n’en avait compris ni l’enjeu ni le sens.
Des années plus tard, elle continuait à dénombrer les premières lumières du soir, comme on consulte les signes d’un monde intérieur. Ce geste, devenu réflexe, était une manière de se relier à ce qui avait été. Elle n’aurait su dire si cela relevait d’un besoin, d’une habitude ou d’un attachement plus profond. Regarder les fenêtres qui s’allumaient dans les rues de Soho ou celles, plus rangées, de Georgetown, relevait du même rituel que dans l’enfance. À travers ces halos jaunes ou bleutés, elle ne cherchait pas à deviner les visages ni les histoires, seulement à sentir que la vie continuait, là, quelque part, même si ce n’était plus la sienne. Chaque lumière derrière une vitre, chaque rideau entrouvert, était un battement, un signe discret, un je suis encore là. Il n’y avait rien à expliquer, rien à rationaliser. Elle regardait, elle sentait, et cela suffisait à maintenir le fil.
À tous ces souvenirs d’enfance s’était greffé, ces dernières années, le spectacle familier du métro aérien qui serpentait face à la fenêtre de sa cuisine. De jour comme de nuit, elle observait le va-et-vient régulier des rames, comme on écoute le ressac. Ce n’était pas seulement des wagons qui passaient, mais tout un échantillon de vies humaines, confortablement assises, absorbées, peut-être, par leurs écrans ou leurs pensées. Le soir, les silhouettes se détachaient plus nettement à travers les vitres, dessinant un théâtre d’ombres en mouvement. À la fréquence des trains ou à la densité des voyageurs, elle savait reconnaître l’heure, parfois même le jour de la semaine. Les week-ends, les passages étaient plus espacés, les compartiments plus clairsemés. La nuit, les visages devenaient rares, les trajets silencieux.
Il y avait aussi les voisins, discrets mais constants, qui promenaient leurs chiens à toute heure, foulant le gazon impeccablement tracé. Ils ramassaient méthodiquement les déjections des petites bêtes, comme on efface chaque jour la trace d’un passage. Ce quartier, voilà près de vingt ans qu’elle y avait déposé ses valises. Elle qui avait longtemps vagabondé, de continent en continent, de villes en villes, d’appartements huppes en maison de ville cossue, elle avait fini par pousser la porte en bois de la maison bleue. Elle n’y avait pas cru tout de suite. Il lui avait fallu du temps pour admettre qu’elle avait atterri, enfin. Mais à force de lumières guettées, de parfums familiers, de métros comptés et de chiens connus par cœur, le lieu avait fini par l’absorber doucement, comme une terre reconnaîtrait enfin son exilée.
Kamel Daoud a-t-il encore quelque chose à dire ou simplement à redire ? Car, The chroniqueur ne questionne pas, il confirme. Il ne dérange pas, il rassure. Derrière l’image d’un écrivain « libre », acclamé à Paris, décoré, publié chez Gallimard, célébré sur les plateaux français, se dessine une fonction beaucoup plus politique que litterraire: celle de chroniqueur officiel d’un récit rassurant pour une France en crise identitaire. Ses romans, comme l’analyse justement l’universitaire Zoubida Berrahou, sont moins des œuvres de création que des vitrines idéologiques. « Houris », son dernier en date, n’est rien de plus qu’un remake de Ô Pharaon — même récit, mêmes symboles, mêmes obsessions, mais cette fois adaptés au goût du jour, lisibles, présentables, récompensables.
Dans ce jeu, l’ambiguïté laisse place a la lisibilité. la complexité à la clarté idéologique : ce n’est pas de littérature dont il s’agit, mais d’un produit éditorial bien emballé. Un roman prêt-à-penser, exportable, compatible avec les attentes d’un public Français inquiet de ses marges, de ses banlieues, de son histoire coloniale non digérée.
Pendant ce temps, le monde vacille : Gaza est dévastée, des civils tombent en Palestine, au Liban, en Syrie, au Yémen et à Téhéran. La France se réarme, frôle la récession et vend des armes en série pendant qu’elle prêche la paix.
Et que fait Kamel Daoud ?
Il continue a designer les memes cibles: Les femmes musulmanes, les Algériens, les binationaux, les corps racisés et les musulmans “pas assez intégrés”. Dans une boucle sans fin, il rejoue la même scène, chronique après chronique, livre après livre. Il n’écrit pas pour révéler le réel, mais pour le reconduire.
Si Le Point, Gallimard ou les grands médias l’aiment tant, ce n’est pas pour son audace littéraire. C’est pour sa capacité à produire un discours « du Sud » qui valide les obsessions Françaises . À faire passer des stéréotypes pour de la critique. À déguiser une adhésion à l’ordre dominant en dissidence.
Kamel Daoud ne dérange pas l’ordre établi, il le renforce. Non pas malgré ses origines, mais à cause d’elles. Il est cette voix du Sud qui rassure l’Occident inquiet. Un chroniqueur de la différence, qui reconduit chaque semaine l’idée que, finalement, le problème, ce sont les autres. Les “siens”.
Non KD n’a pas changé de camp : il l’a choisi. Celui d’un récit figé. D’un monde binaire. D’une fiction politique qui masque sa fonction première : servir le confort intellectuel d’une époque qui préfère les citoyens du Sud qui s’excusent aux écrivains qui accusent.
Comme le dit Berrahou, son œuvre est un palindrome : Elle se lit dans un sens ou dans l’autre. Mais elle ne mène nulle part.
« La mode se démode, le style jamais. » disait la célébrissime Coco Chanel..
Un style c'est donc une respiration , un certain regard, sur la vie .
Un style c'est un savant mélange de pulsions, de poésie et de panache...
Réinventer les lieux et dérouler une sorte de mélodie sans toutefois bouder le fun et oser un chouïa d'excentricité ...